- TRAUMATISMES
- TRAUMATISMESLe terme de traumatisme s’applique généralement, d’une façon globale, à toutes les lésions corporelles subies par un sujet au cours d’une agression externe. Mais c’est le plus souvent l’énergie cinétique qui est à la base de ces atteintes mécaniques. Par extension, la notion de traumatisme a pu également s’appliquer aux autres formes de traumatismes: c’est ainsi qu’on peut parler de traumatisme thermique (brûlure), chimique (intoxication), électrique (électrisation), et le terme de traumatisme psychique a même été employé pour décrire les manifestations neuro-psychiques apparaissant après un événement traumatisant.Quelles qu’en soient les origines, les traumatismes par agression mécanique restent la forme la plus fréquente de ces lésions, et ce sont elles qui serviront de référence aussi bien pour la description clinique que pour la prise en charge sanitaire.1. Classification des principales lésionsLes lésions corporelles peuvent être classées de différentes façons: en fonction de leur nature, de leur topographie, de l’organe ou du tissu atteint.Classification en fonction de leur natureLes contusions . Il s’agit de lésions fermées résultant de chocs directs: projection d’un objet animé d’une grande vitesse ou projection d’un sujet sur un corps fixe. En fait, la gravité d’une contusion dépendra à la fois du choc initial et surtout de la région contuse et des tissus contus. C’est ainsi qu’on peut parler de contusions des parties molles (peau, aponévroses, muscles), des contusions osseuses, etc.Les plaies résultent de l’agression par un objet coupant. L’ouverture du revêtement cutané en est la caractéristique essentielle. C’est l’étendue, la profondeur et surtout la localisation de la plaie qui en détermineront la gravité. C’est ainsi qu’on distinguera des plaies simples, le revêtement cutané seulement, des plaies punctiformes, des plaies profondes, des plaies du visage, du thorax, de l’abdomen, des membres, etc.Les lésions ostéoarticulaires tirent leur identité du tissu spécifiquement atteint: le squelette osseux et les articulations. Plus que les plaies et les contusions, ces lésions doivent faire référence à la région atteinte. On distinguera ainsi les entorses, les luxations et les fractures.– Les entorses sont des lésions simples par atteinte ligamentaire et aponévrotique.– Les luxations, désunion totale ou partielle des surfaces articulaires en présence, s’accompagnent souvent de lésions ligamentaires.(Entorses et luxations intéressent essentiellement les articulations des membres supérieurs et inférieurs et, plus rarement, les articulations du rachis.)– Les fractures sont liées à l’apparition d’une solution de continuité dans un os ; la fracture peut être fermée (sans atteinte concomitante du revêtement cutané susjacent) ou ouverte (plaies associées mettant en communication avec l’extérieur le foyer de fracture).Suivant le mécanisme et les circonstances de survenue, on distinguera des fractures simples et des fractures complexes (plusieurs fragments osseux). Les fractures auront des traductions cliniques différentes suivant le type de l’os atteint (os plat, os long, os court). On peut distinguer séparément les fractures des membres (os longs), les ceintures scapulaires et pelviennes (os courts), du thorax, du rachis, des extrémités céphaliques (os plats).Fractures et luxations résultent de mécanismes divers tels que chocs directs, phénomènes de torsions ou d’arrachement, etc., que le thérapeute doit connaître, car cela lui permettra de rechercher les lésions à distance du point d’impact.Les écrasements résultent de l’association de lésions diverses – fractures, plaies – et sont la résultante d’accidents au cours desquels une partie du corps a été soumise à des forces de pression plus ou moins importantes; la gravité dépend essentiellement de la topographie de la zone atteinte et des forces mises en jeu.Les amputations correspondent à des sections séparatives plus ou moins complètes des parties du corps. Il s’agit de sections et d’amputations intéressant surtout les membres ; elles peuvent être de nature différente suivant le mécanisme initial de l’accident: section nette, arrachement.Classification en fonction de la topographieEn traumatologie, le bilan précise toujours la localisation topographique de la lésion initiale. Classiquement, on distingue:– Les lésions de l’extrémité céphalique ; le visage et les organes qu’il contient (nez, bouche, oreilles, yeux) avec les os de la face, le revêtement cutané (le cuir chevelu), la boîte crânienne. Toutes les lésions peuvent s’observer: contusion du visage, contusion crânienne, plaie simple ou complexe du visage, fracture du crâne simple, fracture du crâne avec enfoncement de la voûte crânienne (embarrure), plaie cranio-cérébrale, plaie du cuir chevelu, plaie oculaire, fracture des os propres de la face, soit fracture simple, soit fracture complexe, voire fracas maxillo-facial, fractures dentaires...– Les lésions du cou sont surtout des plaies cutanées plus ou moins profondes et pouvant intéresser ainsi les organes qui s’y trouvent (vaisseaux artériels et veineux, trachée), plus rarement des contusions directes au niveau de la face antérieure de la trachée.– Les lésions du thorax sont divisées en traumatismes fermés (contusions thoraciques, fractures costales) et en traumatismes ouverts (plaies simples et surtout plaies pénétrantes du thorax avec atteintes des organes internes: atteintes pleurales, pulmonaires, cardiaques avec atteinte des gros vaisseaux).– Les lésions de l’ abdomen : il s’agit, le plus souvent, de contusions fermées de la paroi abdominale avec ou sans atteintes concomitantes des organes intra-abdominaux (foie, rate, intestin, vessie); plus rarement, on pourra constater des plaies pénétrantes de l’abdomen avec ou sans éviscération.– Les lésions des membres , où il faut distinguer les lésions des racines des membres – c’est-à-dire des attaches au thorax pour les membres supérieurs (ceinture scapulaire) et au bassin pour les membres inférieurs (ceinture pelvienne) – et celles des extrémités distales (main et bras, jambe et pied).Toutes les atteintes peuvent s’observer, les entorses et les luxations pour toutes les zones articulaires, les fractures des os des membres, les plaies, les écrasements et les amputations.– Les lésions du rachis ; ce sont le plus souvent des lésions osseuses (fractures, tassement) ou articulaires (entorses, luxations); elles peuvent intéresser la partie haute du rachis (rachis cervical) ou la partie basse du rachis (rachis lombaire).– Les lésions du dos correspondent, en fait, aux lésions du thorax dans sa partie postérieure (siège de contusions, de plaies simples ou de plaies pénétrantes) et à la région des lombes.2. Étude cliniqueL’étude des lésions élémentaires doit se faire en fonction de leur topographie.Les contusions crâniennes peuvent ou non être associées à des fractures du crâne (fracture de la voûte, de la base, etc.), mais, même dans le cas de fracture, la gravité est toujours liée plus à l’importance des dégâts causés au cerveau qu’à l’atteinte osseuse (contusion simple, œdème cérébral, hémorragie intra-crânienne, extra-durale, sous-durale, etc.). Localement, elles se traduisent par l’apparition au point d’impact d’un hématome et, sur le plan général, elles entraînent des pertes de connaissance (initiales ou secondaires) de durée et d’intensité variables: de la simple perte de connaissance passagère au coma traumatique durable. Les traumatismes crâniens, même mineurs, peuvent être associés à des plaies du cuir chevelu allant de la simple plaie au scalp majeur toujours très hémorragique.Les plaies cranio-cérébrales résultent d’une fracture ouverte de la boîte crânienne avec lésion directe du cerveau. Elles entraînent, le plus souvent, un coma traumatique d’emblée, les complications septiques sont fréquentes et, dans le cas de survie, les séquelles neuro-psychiques sont souvent très importantes.Les contusions du visage , comme celles du crâne, peuvent être associées à des fractures des os de la face et, contrairement au crâne, elles sont très facilement visibles cliniquement dès l’examen en raison de la déformation des repères osseux. La douleur, l’hématome, l’œdème en sont des traductions cliniques principales.Les plaies du visage sont soit simples (plaies superficielles), soit profondes et délabrantes: le risque vital est quasi nul; par contre, les séquelles par cicatrices inesthétiques représentent le risque majeur. Dans d’autres cas, il s’agit de plaies très profondes et hémorragiques.Les fracas du visage (fracas maxillo-faciaux) associent plaies, fractures et délabrement osseux; ils sont susceptibles d’avoir un impact immédiat sur le pronostic vital par l’obstruction des voies respiratoires liées à la destruction des filières de l’air, à l’hémorragie. Dans une certaine mesure, les plaies profondes et hémorragiques peuvent avoir les mêmes conséquences chez une victime inconsciente (traumatisme crânien associé).Dans de très nombreux cas, les plaies profondes et les fracas maxillo-faciaux peuvent avoir un double retentissement: vital (hémorragies, troubles ventilatoires) et fonctionnel (déformations, cicatrices).Les contusions et les plaies du cou tirent leur gravité de l’atteinte possible du larynx, de la trachée (troubles respiratoires aigus avec dyspnée, cyanose). Les plaies profondes peuvent concerner les vaisseaux de la base du cou (carotide, jugulaire) et être responsables d’hémorragies gravissimes. Les plaies de la trachée entraînent une détresse respiratoire rapide.Les traumatismes fermés du thorax englobent toutes les lésions non pénétrantes, qu’il s’agisse de contusions simples ou majeures, de fractures de côtes isolées ou multiples. Les conséquences d’un traumatisme thoracique se mesurent essentiellement à la gravité: soit des lésions externes affectant les parois de la cage thoracique et qui auront un retentissement sur la respiration par l’atteinte des mouvements respiratoires (mécanique ventilatoire) – c’est le cas des fractures de côtes multiples (volet costal) –, soit des lésions internes (poumon, trachée, gros vaisseaux, cœur) qui auront également un retentissement à la fois ventilatoire et circulatoire (contusions pulmonaires, rupture de bronches, lésions pleurales avec hémo- et pneumothorax, contusion cardiaque avec arrachement ou désinsertion des gros vaisseaux).Les troubles ventilatoires (de la simple gêne respiratoire à la détresse majeure) et cardio-vasculaires (hémorragie interne massive) sont donc les deux dominantes cliniques des traumatismes fermés du thorax, qui peuvent avoir, de ce fait, un impact sur le pronostic vital très précoce.Les traumatismes ouverts (dits thorax ouverts) sont des lésions plus rares. Résultant de faits de guerre (éclat d’engin explosif, plaies par balle) ou d’agression (plaie par arme à feu ou arme blanche), ils comportent une gamme étendue de lésions allant de la simple plaie pénétrante n’affectant que la paroi pulmonaire au gros fracas thoracique avec brèche pariétale majeure.Comme pour les thorax fermés, la gravité de telles lésions dépend de l’importance du retentissement ventilatoire (plaie soufflante, pneumothorax compressif, lésions bronchiques et pulmonaires, etc.) et du retentissement circulatoire (hémorragie interne par plaie du tissu pulmonaire, des gros vaisseaux, du cœur). Dans la plupart des cas, le pronostic vital peut être engagé directement.Les traumatismes abdominaux comprennent toutes les lésions fermées de l’abdomen. Ce sont uniquement des contusions dont la gravité est liée à l’importance du choc initial et à sa localisation. En effet, la paroi musculo-aponévrotique de l’abdomen transmet intégralement l’énergie traumatique aux viscères intra-abdominaux. Suivant leur nature, les lésions peuvent être différentes: pour les organes «pleins» (foie, rate), les contusions et les plaies, voire les ruptures sont génératrices d’hémorragies internes graves; pour les organes «creux» (intestin, estomac), les ruptures, les éclatements avec lésions des mésos et des vaisseaux peuvent induire, en plus de l’hémorragie, des complications infectieuses (péritonites). Dans tous les cas, c’est l’hémorragie interne qui représente le risque vital le plus immédiat.Les plaies de l’abdomen , comme pour les traumatismes ouverts du thorax, peuvent présenter des tableaux très variables: de la simple plaie pénétrante sans atteinte viscérale à la brèche pariétale avec éviscération. Toutes les lésions intermédiaires peuvent s’observer suivant la nature de l’agent vulnérant, sa taille, sa forme, sa vitesse de pénétration. L’hémorragie par atteinte des organes intra-abdominaux représente un risque vital précoce; l’infection avec péritonite est un risque vital à très court terme.Les traumatismes thoraco-abdominaux : certains accidents, par leur nature (plaies par balle) ou leur violence (traumatisme par choc direct), sont susceptibles d’intéresser à la fois l’abdomen et le thorax. Il en résultera plusieurs lésions des viscères intra-thoraciques et abdominaux associant les conséquences déjà envisagées.Les traumatismes du bassin : ce sont des traumatismes fermés associant des contusions, des lésions osseuses et viscérales (reins, uretère, vessie); en outre, le risque lié à l’hémorragie par lésions des viscères, les lésions osseuses font toute la gravité de ces atteintes.Les traumatismes des membres : qu’il s’agisse des membres supérieurs ou des membres inférieurs, ces traumatismes comprennent deux catégories bien distinctes de lésions.– Les traumatismes fermés sont soit de simples contusions musculaires, soit, le plus souvent, des lésions ostéo-articulaires (entorses, luxations, fractures). Les conséquences immédiates sont liées à l’impotence fonctionnelle qui en résulte, liée à la lésion initiale, à la douleur; le risque hémorragique est beaucoup plus rare. L’importance de ces manifestations est liée à la taille du membre; elles sont plus fréquentes pour le membre inférieur que pour le membre supérieur et pour un membre donné, plus marquées pour les articulations proximales (épaule, coude, hanche, genoux) que pour les articulations distales (poignet, main, cheville, pied).Certains traumatismes fermés liés aux lésions par compression prolongée (crush syndrome ou lésion par compression) sont très spécifiques quant à leur mécanisme et à leurs conséquences à court et à moyen terme (état de choc, insuffisance rénale).– Les traumatismes ouverts regroupent toutes les autres lésions: plaies, fractures ouvertes, fracas de membres, amputations. Il est difficile de dissocier souvent un risque vital et fonctionnel, compte tenu de l’intrication des lésions et de leur évolution.Le risque vital est surtout lié à l’importance des lésions vasculaires provoquées par les plaies, les écrasements, les amputations (plaies profondes des racines de membres: région inguinale et axillaire, amputations, écrasement ou arrachement de segments de membres – bras, jambe, etc.). Le risque fonctionnel dépend des lésions osseuses, vasculo-nerveuses, vasculaires et tendineuses. L’hémorragie, la douleur, l’impotence fonctionnelle en sont les manifestations habituelles.Les lésions du rachis peuvent être isolées ou associées aux autres lésions (crâne, bassin, membres supérieurs et inférieurs, thorax et abdomen). Il s’agit presque toujours de lésions osseuses et ostéo-articulaires (articulation vertébro-vertébrale) dont la gravité est liée non à l’atteinte osseuse, mais aux lésions neurologiques médullaires par compression ou blessure par un fragment osseux.Schématiquement, on peut considérer:– les lésions hautes du rachis cervical (entorse, luxation vertébrale) susceptibles de provoquer des atteintes médullaires de gravité variable (paraplégie, quadriplégie) soit immédiatement, soit secondairement;– les lésions basses du rachis dorsal et dorso-lombaire qui peuvent entraîner des paraplégies de gravité variable suivant la hauteur de l’atteinte médullaire. Les signes initiaux (paresthésie, fourmillements, diminution de la force musculaire segmentaire) doivent être connus par les participants des premiers secours afin d’éviter toute aggravation. Le tableau clinique complet est constitué par une impotence plus ou moins complète. Le risque vital est dominé par les lésions hautes, et le risque de séquelles est majeur dans tous les autres cas (paralysie définitive).3. Circonstances et mécanismes de survenue des traumatismesLes traumatismes surviennent au cours des différentes activités humaines, et chacune d’entre elles donne aux accidents des particularités quant à la topographie, la nature et la gravité des lésions.Les accidents domestiquesDans la plupart des cas, les accidents domestiques sont responsables de lésions relativement bénignes; il s’agit de plaies des mains (manipulation d’objets coupants, d’appareils ménagers), de plaies du visage (chute de sa hauteur), de contusions des parties molles.Il faut distinguer le milieu urbain du milieu rural pour la survenue de certains accidents assez spécifiques; à titre d’exemple, les chutes de grande hauteur en milieu urbain sont fréquentes chez les enfants et génératrices de lésions très graves, avec fractures multiples des membres, traumatisme crânien et traumatisme du rachis, lésions endothoraciques et intra-abdominales.Par ailleurs, les modifications de l’urbanisme et l’apparition de nouvelles technologies ont entraîné, depuis quelques années, des modalités nouvelles d’accidents: lésions par écrasement avec des portes automatiques de garage, dans des ascenseurs non protégés, etc. En milieu rural, les lésions par faits d’animaux (morsures), les chutes d’échelle et d’arbre provoquent des lésions variées mais où dominent cependant plaies et fractures des membres, du crâne et du rachis.En milieu urbain comme en milieu rural, ces traumatismes domestiques viennent se surajouter aux autres formes d’agression résultant d’erreurs de comportement, d’ignorance, d’imprudence et d’inadéquation, en termes de sécurité, entre l’environnement et les habitants: brûlures, intoxications, électrisations, etc.La fréquence, l’importance de la morbidité liée aux accidents domestiques, l’incidence économique non négligeable ont incité les pouvoirs publics à lancer plusieurs campagnes d’information pour tenter de réduire le nombre de ces traumatismes.Les accidents du travailIls peuvent engendrer toutes les lésions décrites, qui pourront présenter tous les niveaux de gravité possible, en fonction du type d’activité. Très schématiquement, on peut distinguer:– les industries métallurgiques lourdes, où dominent les lésions des membres supérieurs et des membres inférieurs avec plaies, fractures, écrasements et amputations distales. Les lésions du crâne, de l’abdomen, du thorax sont plus rares, sauf en cas de chute ou d’écrasement par des objets très lourds;– l’industrie du bâtiment et de la construction est caractérisée par les accidents de chantier, avec chute de grande hauteur, écrasement pour les accidents les plus graves et qui s’associent à des lésions moins graves: plaies, fractures, etc.;– les industries de fabrication et de transformation provoquent surtout des accidents au niveau des mains.Globalement, les traumatismes liés au travail sont plutôt réduits par rapport aux accidents domestiques en raison de l’importance des mesures de prévention, des obligations réglementaires en matière de sécurité adaptées à chaque type d’industrie, voire à chaque poste de travail à risque.Les accidents de loisirsL’organisation des loisirs et la diversité des pôles d’activité dans ce domaine sont devenues un phénomène de société; en contrepartie, les traumatismes liés aux loisirs augmentent chaque année d’une façon considérable sans que de véritables mesures de prévention puissent être mises en place et suivies d’une façon efficace; chaque activité de loisirs a ses propres règles de sécurité, mais le défaut de formation, d’encadrement et de prise en compte des impératifs de sécurité entraîne de nombreux accidents, autant chez le néophyte que chez le sujet entraîné.On peut très schématiquement distinguer:– les activités sportives traditionnelles, individuelles ou collectives, où dominent les lésions ostéo-articulaires, tendineuses et musculaires (entorses, luxations, fractures, contusions musculaires, etc.);– les activités sportives à risque plus élevé en raison de leur nature même; il s’agit du parachutisme, du parapente, de la randonnée de haute montagne, de l’alpinisme, de l’escalade, du canoë-kayak, où dominent les lésions provoquées par les chutes (lésions crâniennes et rachidiennes, thoraco-abdominales, fractures des membres, etc.);– certaines activités à la fois sportives et de loisirs entraînent des lésions qu’on trouve aussi dans d’autres circonstances: dans l’aviation, le motonautisme, etc.; ce sont alors des lésions très graves qu’on rencontre habituellement dans les accidents du trafic;– les activités de loisirs qui associent les lésions des accidents domestiques à celles du travail; dans ce domaine, le développement des techniques de bricolage – qu’il s’agisse de la maison ou du jardin – est surtout générateur de lésions des mains et des pieds (plaies délabrantes, amputations, sections, fractures fermées ou ouvertes, etc.).Les accidents du traficActuellement, en France, ce sont les accidents du trafic routier qui représentent la source la plus importante de traumatismes; de même, ce sont ces accidents qui ont permis de légiférer, surtout dans le domaine de l’organisation des secours; la prévention reste trop en retrait, trop superficielle, axée essentiellement sur des campagnes sporadiques d’information et de sensibilisation dont les résultats ont montré leur faible efficacité en raison d’objectifs flous et incertains.Au cours des accidents du trafic, tous les traumatismes précédemment décrits peuvent s’observer; on pourra ainsi distinguer:– les traumatismes bénins avec contusions des membres, petites plaies superficielles du visage et des membres; ils ne concernent que des blessés légers ne nécessitant que des soins ambulatoires;– les traumatismes plus sérieux avec fracture isolée ou fractures multiples des membres, des contusions modérées du crâne, du thorax et de l’abdomen; les victimes sont appelées polyblessés ou polyfracturés;– les traumatismes graves associant des lésions viscérales et des lésions osseuses des membres; ils concernent les polytraumatisés.4. Manifestations cliniques des principaux traumatismesLes traumatismes ont des traductions cliniques relativement stéréotypées qui sont fonction de la nature de la lésion élémentaire et de son siège. Ces manifestations sont locales, loco-régionales et générales.Les manifestations locales et loco-régionales représentent l’ensemble des signes cliniques qui s’observent au niveau de la lésion elle-même (manifestations locales) ou à proximité (manifestations loco-régionales).– Les troubles de la sensibilité sont caractérisés par la douleur, qui est fréquente dans la plupart des contusions, des atteintes ostéo-articulaires et des lésions plus complexes (fracas, écrasement, etc.).L’apparition de la douleur est fonction de la région atteinte (et de sa richesse en fibres nerveuses) et du traumatisme initial qui entretient le processus algogène. À côté de la douleur, on peut constater localement d’autres anomalies de la sensibilité; paresthésie, anesthésie, hypoesthésie, qui traduisent, en règle générale, des atteintes directes des nerfs sensitifs.– Les troubles de la motricité s’observent essentiellement au niveau des membres supérieurs et inférieurs; il faut distinguer l’impotence fonctionnelle liée à la douleur, aux modifications des rapports anatomiques (fréquentes dans toutes les lésions ostéo-articulaires), des paralysies vraies liées à une atteinte des nerfs moteurs soit localement (plaies nerveuses), soit à distance (atteinte médullaire).Les troubles du tonus caractérisés par des contractures sont plus fréquents que les hypotonies musculaires; il peut s’agir souvent de contractures réflexes (fractures, contusions musculaires, etc.).– Les manifestations les plus simples des modifications des repères anatomiques et des modifications morphologiques sont constituées par l’œdème, qui peut, dans certains cas, modifier considérablement la morphologie d’une partie du corps (le visage en particulier). Dans d’autres cas, c’est l’importance du traumatisme et des modifications structurelles qui est responsable de ces modifications (fracas maxillo-faciaux, fracas de membres).– Les modifications de la coloration du revêtement cutané se caractérisent par l’apparition d’un hématome superficiel qui traduit une extravagation sanguine.De l’ensemble des manifestions générales , trois d’entre elles doivent être retenues:– Les manifestations neuro-psychiques, qui se traduisent par des troubles du comportement et de la vigilance (agitation, torpeur, somnolence, désorientation temporo-spatiale); dans la plupart des cas, ces troubles sont provoqués par la douleur, mais ils peuvent être le reflet d’une souffrance cérébrale indirecte par hypoxie (troubles ventilatoires), par hypovolémie (hémorragie) ou d’une souffrance directe (contusion cérébrale). L’apparition de troubles neurologiques purs (convulsions, paralysie motrice, coma) signe les atteintes directes du système nerveux (traumatisme crânien et médullaire). De l’ensemble de ces troubles neuro-psychiques, les pertes de conscience représentent un risque vital réel en raison des troubles ventilatoires secondaires qu’elles peuvent entraîner par obstruction des voies respiratoires.– Les manifestations ventilatoires prennent toutes les formes cliniques: de la simple gêne ventilatoire liée à une contusion costale à la grande détresse ventilatoire. Ces troubles ventilatoires s’observent, en général, dans les lésions graves de l’extrémité céphalique (traumatisme crânien avec perte de connaissance, fracas maxillo-faciaux avec obstruction des voies aériennes) et du thorax (grands volets costaux, plaies pleuro-pulmonaires). Ils peuvent être responsables d’arrêt cardiaque précoce par hypoxie.– Les manifestations cardio-vasculaires sont surtout marquées par les conséquences des hémorragies ; le choc hémorragique en est la traduction la plus grave. Ce sont surtout des lésions internes (thoraciques et abdominales) par les plaies des gros vaisseaux qui sont responsables de ces hémorragies.Dans les hémorragies gravissimes, la mort par désamorçage du cœur est le risque vital essentiel.Au cours de la prise en charge d’un traumatisé, le bilan doit mettre en évidence les troubles cliniques dominants. On peut schématiquement constater trois situations:– les troubles psychiques sont au premier plan (coma, paralysie, etc.), il n’y a pas de trouble ventilatoire ni cardio-vasculaire;– les troubles ventilatoires sont majeurs, la détresse ventilatoire est évidente et les autres troubles (neuro-psychiques et cardio-vasculaires) sont plus faibles;– les troubles cardio-vasculaires avec signes d’hémorragie sont manifestes et priment sur les autres troubles.Cette appréciation rapide de la gravité permet aux équipes médicales chargées d’assurer la prise en charge sur le terrain de déterminer les priorités de traitement.5. Le suivi médical des blessésLa prise en charge des traumatisés comporte deux volets: une prise en charge sur le lieu de l’accident et pendant le transport, une prise en charge dans les structures de soins hospitalières.Les soins à l’hôpitalLes soins hospitaliers seront envisagés ici en fonction d’une organisation des secours incluant au préalable la prise en charge sur le terrain avec, si nécessaire, une réanimation précoce autorisant une orientation hospitalière adéquate.Dans le cadre ainsi défini, le déroulement des soins à l’hôpital relève d’une stratégie globale, fondée sur la gravité réelle ou potentielle de l’accidenté. Par ordre de gravité croissante, on peut considérer plusieurs sortes de soins:– Cas des blessés très légers. Il s’agit de lésions très bénignes, sans potentiel d’aggravation, accessibles à un traitement simple qui peut être réalisé immédiatement sans préparation particulière, ce qui ne justifie pas, le plus souvent, une hospitalisation; la surveillance ultérieure, tout aussi simple, est faite à titre ambulatoire.Entrent dans cette catégorie les lésions superficielles des membres (contusion, petites plaies) et les lésions ostéo-articulaires élémentaires (entorses et fractures des articulations distales).– Cas des blessés moyens (urgences relatives). Ces blessés présentent des lésions simples, peu évolutives, qui ne compromettent pas le pronostic vital et très rarement le pronostic fonctionnel; elles nécessitent cependant un traitement réparateur, chirurgical le plus souvent, pour lequel l’hospitalisation est indispensable. Mais ce traitement pourra être différé dans le temps pour permettre un bilan pré-opératoire complet permettant de déceler les éventuelles tares organiques que pourrait présenter le blessé de façon que l’acte chirurgical et l’anesthésie générale qui l’accompagne n’induisent pas un risque supplémentaire (anesthésie générale chez un sujet à estomac plein, existence d’antécédents pathologiques, interférences médicamenteuses avec les traitements en cours).Dans cette catégorie de blessés, on peut trouver, par exemple, les fractures des os longs nécessitant un traitement orthopédique ou une ostéosynthèse, des plaies musculo-aponévrotiques plus ou moins profondes, des plaies tendineuses, etc. Une surveillance postopératoire de quelques jours pour la poursuite des soins (pansements, drains, etc.) pourra être nécessaire.– Cas des blessés légers mais avec risque d’aggravation (urgences potentielles). Ce sont des accidentés pour lesquels il existe un doute sur la gravité des lésions et sur leur potentiel d’évolutivité; ces blessés, qui ne justifient pas toujours d’un traitement, doivent cependant bénéficier d’investigations relativement spécifiques et surtout d’une surveillance attentive pour déceler rapidement toute aggravation.Dans cette catégorie, on peut trouver: les traumatismes crâniens avec perte de connaissance initiale, les contusions abdominales et thoraciques importantes, les compressions prolongées des membres. De telles situations d’urgences potentielles vont justifier des examens répétitifs adaptés à la topographie lésionnelle.Parmi l’ensemble des examens, il faut citer les bilans radiographiques (radiographie standard, tomodensitométrie), les examens échographiques et les examens biologiques; ceux-ci ont deux finalités: d’une part, objectiver les anomalies induites par l’accident, et qu’il convient de corriger, et, d’autre part, révéler une pathologie antérieure qui peut s’aggraver ou se décompenser à l’occasion du traumatisme.Les prélèvements sanguins auront pour but de rechercher une déglobulisation par hémorragie (hématocrite, numération globulaire), des modifications du ionogramme sanguin traduisant des anomalies de l’équilibre hydroélectrolytique, des perturbations des facteurs de coagulation susceptibles de compliquer l’acte opératoire, une identification du groupe sanguin permettant d’envisager rapidement une éventuelle transfusion sanguine.Pour ces blessés, le traitement chirurgical sera fonction de la lésion présentée (réduction d’une fracture par ostéosynthèse, suture d’une plaie, réduction d’une luxation, etc.); l’acte chirurgical sera effectué sous anesthésie générale ou sous anesthésie loco-régionale, plus ou moins rapidement en foncion de la nécessité d’assurer une préparation pré-opératoire.– Cas des blessés graves et très graves (urgences absolues). Il s’agit de victimes présentant une ou plusieurs lésions qui mettent en jeu, à court terme, le pronostic vital. Pour ce type de blessés qui sont pris en charge sur le terrain par des équipes médicales (S.A.M.U., S.O.S. médecins), on admet actuellement que la priorité doit être donnée à la réanimation symptomatique avant le traitement chirurgical proprement dit; à l’exception, toutefois, d’un geste immédiatement salvateur (essentiellement le geste d’hémostase).Le traitement de ces blessés se décompose donc en trois étapes: l’étape pré-opératoire, qui correspond à la phase de réanimation et de préparation à l’intervention chirurgicale, l’étape per-opératoire, qui est représentée par l’intervention elle-même, et enfin, l’étape postopératoire, qui va conduire à la guérison.La réanimation symptomatique , étape pré-opératoire, est axée sur trois priorités:– la réanimation cardio-circulatoire, qui est poursuivie à l’aide de sang ou de dérivés sanguins (sang frais, sang conservé, sérum albumine, plasma frais congelé, etc.). En milieu hospitalier, ce remplissage peut être sous contrôle hémodynamique (P.V.C., etc.);– la réanimation ventilatoire est le prolongement de celle qui est commencée sur le terrain. Dans les situations graves où la perte de conscience se prolonge pendant plusieurs jours (traumatismes crâniens), l’intubation trachéale est remplacée par la trachéotomie. Suivant l’importance de l’atteinte pulmonaire (contusion pulmonaire grave, œdème pulmonaire), on fera appel à des techniques de ventilation très variées et très complexes (ventilation à poumons séparés, ventilation avec P.E.P., etc.);La réanimation métabolique corrigera toutes les anomalies biologiques constatées au cours du bilan d’entrée ou au cours de l’évolution (troubles de l’équilibre acido-basique, de l’équilibre hydrominéral, de la coagulation, etc.). Dans certains cas (insuffisance rénale après écrasement de membre par exemple), on peut être amené à pratiquer une ou plusieurs séances d’épuration extrarénale avant tout acte chirurgical.La sédation est indispensable chez la plupart des grands polytraumatisés, elle diminue les réactions de stress lié à l’agression traumatique, favorise le calme et le confort du blessé et la mise en œuvre des soins et de la surveillance. La préparation à l’acte chirurgical est complétée par le contrôle et la mise en place des derniers éléments de surveillance: sonde gastrique, sonde urinaire, drainage thoracique, capteurs pour la surveillance électrocardioscopique, étant entendu que les autres examens, envisagés pour les autres cas, ont été réalisés dès l’arrivée.Le traitement chirurgical va varier suivant l’aspect lésionnel; il y a plusieurs orientations thérapeutiques réalisées dans des services différents:– la chirurgie orthopédique prend en charge tous les aspects lésionnels ostéo-articulaires, musculo-aponévrotiques et tendineux; une certaine spécialisation s’inscrit dans ce contexte et concerne les lésions cervico-dorso-lombaires du rachis;– la chirurgie abdominale assure le traitement de toutes les lésions viscérales de la cavité abdominale (foie, rate, tube digestif, etc.), des fosses lombaires (reins); les services d’urologie peuvent être amenés à prendre en charge les lésions isolées de l’arbre urinaire ou des reins;– la chirurgie thoracique traite les lésions endo-thoraciques, qu’elles soient pulmonaires, pleurales, bronchiques ou vasculaires; une spécialisation particulière peut être requise (chirurgie vasculaire ou chirurgie cardiaque) pour les lésions du cœur et des gros vaisseaux;– la neurochirurgie est responsable du traitement des lésions crâniennes (plaie cranio-cérébrale, hématome extra-dural, etc.);– la chirurgie maxillo-faciale, la chirurgie ophtalmologique et la stomatologie assurent le traitement de toutes les lésions de la face et de ses annexes;– les services de brûlés assurent à la fois la réanimation et le traitement chirurgical des grands brûlés.Pour un grand nombre de spécialisations chirurgicales, il existe des services différents pour adultes et pour enfants. La tendance actuelle est d’envisager l’utilisation de centres de polytraumatologie, où l’ensemble des moyens de diagnostics et de thérapeutiques sont disponibles afin que tous les soins puissent être programmés et hiérarchisés en fonction de l’état du blessé.Rééducation et réinsertion socioprofessionnelleC’est la troisième et dernière phase du traitement d’un accidenté, qui va conduire à la prise en charge des séquelles (somatiques et psychiques) des lésions primitives pour aboutir à sa réinsertion socioprofessionnelle totale ou partielle. Cette étape capitale pour tous les grands blessés, dont le traitement hospitalier peut s’étendre sur plusieurs mois, est très diversifiée suivant la nature et la topographie des lésions comportant:– la rééducation motrice pour toutes les séquelles ostéo-articulaires et tendineuses, à savoir: fractures, entorses, luxations (les méthodes utilisées sont très variables); la kinésithérapie, la mécanothérapie, la balnéothérapie (elles ont toutes pour objectif la récupération des mouvements des membres et prennent un aspect particulier pour l’utilisation de prothèse après amputation);– la rééducation fonctionnelle des paralysies motrices (paraplégies) est plus longue et plus complexe, car elle vise à donner au blessé une certaine autonomie motrice mais également sphinctérienne dans beaucoup de cas;– la rééducation neurologique et neuropsychique vise à prendre en charge les séquelles des traumatismes crâniens: amnésie, aphasie, troubles du langage et de la parole, troubles de l’audition; elle fait appel, entre autres, à l’orthophonie et à la rééducation psychomotrice;– la kinésithérapie respiratoire est utilisée dans le traitement des séquelles de certains traumatismes thoraciques.
Encyclopédie Universelle. 2012.